Les outils développés

Le modèle numérique 

Le projet DEMETHER a pour objectif, à travers le développement d’un modèle numérique applicable aux écosystèmes fluviaux, de comprendre et prédire la dynamique spatio-temporelle d’un cortège d’espèces de macrophytes aquatiques submergés.

Un modèle mécaniste

Il s’agit d’un modèle mécaniste, un outil d’exploration qui diffère des modèles empiriques basés sur des relations statistiques établies à partir d’un jeu de données collectées dans des conditions spécifiques. Cette approche mécaniste consiste à implémenter des processus biologiques et physico-chimiques permettant par la suite de simuler leur influence respective dans le développement et l’évolution de systèmes tels que les herbiers de macrophytes.

Il est ainsi possible de prendre en compte l’effet d’un nombre important de variables et leurs interactions, mais aussi de se focaliser sur l’influence de l’une d’elle, toutes conditions égales par ailleurs, pour comprendre son rôle dans la dynamique des herbiers. Les modèles mécanistes présentent en outre l’avantage de pouvoir simuler des situations pour lesquelles peu de données de terrain existent, notamment sur des périodes temporelles et pour des conditions environnementales non documentées au préalables. De plus, les résolutions spatiale et temporelle obtenues sont plus fines que ce que permettent des observations par mesures in situ ou par télédétection.

Le modèle DEMETHER est basé sur le couplage entre un module de production végétale, développé spécifiquement dans le cadre du projet, et un code hydrodynamique (Telemac Mascaret, développé par EDF) de manière à intégrer le forçage lié aux variations de la hauteur d’eau et de la vitesse du courant. Les autres variables conditionnant la production des macrophytes dans le projet DEMETHER sont la température, l’intensité lumineuse, le
jour de l’année, la profondeur, la vitesse du courant, et la nature du substrat.

Déterminisme multifactoriel des macrophytes submergés dans la Garonne d'après le modèle mécaniste de VAS du projet DEMETHER : influences des variables environnementales dans les processus biologiques.

L’intérêt des approches mécanistes se trouve aussi dans la « portabilité » des modèles. Développés à partir de processus généraux, ceux-ci peuvent être facilement transposés d’un écosystème à un autre (contrairement aux modèles empiriques résultant d’approches corrélatives basées sur un jeu de données particulier).

Un modèle multispécifique spatialisé 

Le modèle DEMETHER a été développé pour un cortège d’espèces aquatiques submergées dominantes sur la Garonne : le myriophylle en épi (Myriophyllum spicatum), la renoncule flottante (Ranunculus fluitans) et le potamot noueux (Potamogeton nodosus). Pour chacune d’elles, le modèle a été paramétré en tenant compte de leurs caractéristiques physiologiques et morphologiques propres, telles que la réponse de leurs taux de production brute et de respiration aux variations de lumière et de température, l’architecture de la plante et sa capacité à résister à la brisure et à l’arrachage par le courant.

Le modèle est spatialisé à l’échelle d’un tronçon de rivière, ce qui permet de tenir compte de l’influence de la variabilité spatiale des déterminants de la dynamique des herbiers et de cartographier la biomasse simulée à l’échelle du site, en tout point d’un maillage préalablement défini. Le modèle a été calibré et testé sur trois secteurs de la Garonne moyenne. Mais son utilisation dans un contexte différent est tout à fait envisageable. Le seul prérequis pour réaliser une simulation de la dynamique des herbiers est de disposer de mesures écophysiologiques sur les espèces végétales dominantes et de données sur les conditions bathymétriques locales.

Un modèle pour répondre à des questions fondamentales et appliquées

Le modèle DEMETHER permet de contribuer à diverses problématiques, qu’elles concernent la compréhension des mécanismes de structuration des communautés ou la gestion des écosystèmes fluviaux.

Le modèle DEMETHER a ainsi été mis en œuvre pour appréhender l’évolution prévisible des communautés de macrophytes en réponse à l’augmentation des températures au travers de la comparaison de différents scénarios climatiques. Outre le fait d’apporter des informations sur l’influence du réchauffement climatique sur la dynamique des herbiers, ces approches ont permis de progresser dans notre compréhension des mécanismes de structuration des communautés et de coexistence des espèces au sein des communautés de macrophytes.

Le modèle DEMETHER a également vocation à servir d’outil d’aide à la gestion. Il peut par exemple apporter des réponses à des questionnements tels que le devenir du système en cas d’introduction d’espèces végétales à forte productivité ou au développement précoce, ou la réponse du système à différents scénarios de gestion envisagés pour réduire la prolifération des herbiers (réservation de débits, faucardage des macrophytes…). De ce point de vue-là, le modèle a toute sa place dans une perspective de gestion adaptative, et ouvre des possibilités d’optimisation des pratiques (ex. : saison et/ou fréquence optimales de faucardage).

Autres outils

Localisation du cortège végétal sur le site de Seilh (septembre 2017) : (1) renoncule flottante, (2) myriophylle en épis et le (3) comprend 8 espèces de macrophytes aquatiques submergés dont le potamot noueux (Potamogeton nodosus) @Diane Espel (Phantom 4 Pro)